Vainqueur des Templiers en 2006, quatrième des championnats du monde 2009 (appelés à l’époque « Challenge mondial »), Gilles Guichard est depuis quelques années l’accompagnateur – sparring partner de l’équipe de France féminine de trail. Pour le Forézien, cycliste dans sa première vie, la course à pied relève du sacerdoce.
Athlétisme Magazine : J’aime courir parce que…
Gilles Guichard : Depuis que je suis gamin, j’ai toujours couru naturellement. Mon père me disait que j’étais constamment pressé. Au départ, je croyais qu’il avait raison, mais je me suis finalement rendu compte que j’aimais juste courir, sans esprit de compétition. Le collège était trop loin pour y aller en courant, mais je faisais toujours le kilomètre qui séparait l’arrêt de bus de la maison à petites foulées, à l’aller comme au retour. Souvent, il y avait des changements de bus, et pour éviter la cohue à la fin des cours, je faisais trois bornes en courant pour couper un peu et gagner du temps sur les autres.
Comment est venue la compétition ?
J’ai fait du vélo à haut niveau jusqu’à 30 ans et, même après avoir arrêté les courses, j’ai continué à rouler de mon côté, en intégrant une séance par semaine de course à pied. Je me disais toujours qu’il fallait que je participe aux quelques courses qui me faisaient envie dans la région stéphanoise, mais je repoussais toujours l’échéance. Je me suis finalement lancé avec un copain, lors du semi-marathon de Bonson, avec comme défi de finir en 1h15’. J’ai préparé ça avec le peu de connaissances que j’avais de l’entraînement, surtout avec mon vécu sportif. J’ai couru en 1h14’46’’, mais j’ai terminé vraiment à bout de souffle. La compétition ne s’improvise pas, et l’effort à pied n’a rien à voir avec le vélo.

Puis le trail est arrivé dans votre vie…
J’ai enchaîné avec le marathon de Lyon (en 2h32’) pour ma deuxième année de course à pied, avant de découvrir le trail, vers 2003. Comme j’aimais courir en nature, j’ai vite compris que j’avais trouvé ma voie. Les Templiers et d’autres épreuves, qui existaient depuis quelques années, me faisaient briller les yeux. Le choix était le bon, car je n’aurais jamais fait la même carrière sur la route. Ce n’était pas encore le trail tel qu’il est devenu, c’était un peu après les premiers pas, pour le fun. Aujourd’hui, la discipline se professionnalise.
Maintenant que votre carrière est derrière vous, votre pratique a-t-elle évolué ?
Il faut accepter de courir moins vite quand on prend des années, d’être dépassé par d’autres. Si on ne philosophe pas dans le sport, ce sera encore plus difficile dans la vie quotidienne. Mais en apprenant à bien se connaître, on peut maintenir un bon niveau physique. Je ne cours plus tous les jours parce que mon genou est usé, et je dois faire pas mal de soins et d’exercices pour le ménager. J’ai toujours dit que j’étais prêt à arrêter la compétition du jour au lendemain, mais je veux courir le plus longtemps possible, jusqu’à la fin de mes jours, alors je me contente de ce que je peux faire. Plus que les résultats, c’est l’amour de la course à pied qui donne le plaisir. C’est tellement facile de courir, tu n’as besoin de presque rien…
Courez-vous en groupe ou en solo ?
Je cours plus souvent en groupe depuis ma blessure, mais j’aime bien m’entraîner seul aussi. Je partage ces moments avec les gens du club au sein duquel j’entraîne, Atoutsports. J’ai aussi réussi à transmettre le goût à mes trois enfants, et je cours avec eux. Ce ne sont pas des compétiteurs, mais de les voir courir deux fois par semaine, dans mon groupe d’entraînement, c’est un bonheur ! On court une heure ensemble, et j’enchaîne avec ma séance. Ça permet de partager un bon moment, de discuter, d’échanger sur des sujets inhabituels. J’espère qu’ils vont garder cette discipline de vie très longtemps…
La course à pied est aussi une histoire de relations humaines…
C’est primordial. Philippe Propage m’a entraîné et épaulé pendant très longtemps, et m’a beaucoup apporté, sportivement et humainement. Aujourd’hui, je suis ravi de pouvoir lui donner un coup de main au sein de l’encadrement de l’équipe de France, car il le mérite vraiment. Avec Thierry Breuil, mon coéquipier au sein du team Adidas pendant de longues années, on a partagé de grands moments, et même si on ne se voit pas souvent, on s’écrit ou on s’appelle très régulièrement. Ce sont des souvenirs inoubliables, en course comme en dehors. Au final, de belles amitiés se créent, avec des liens très forts.
Rédacteur : Etienne Nappey