Petite, Floriane Hot aimait courir après le ballon sur les terrains de football. Devenue contrôleuse aérienne, elle s’est découvert une passion pour la course à pied en courant son premier marathon à 23 ans. Depuis, elle a accumulé les kilomètres pour s’offrir un premier titre de championne de France sur 100 km. Fin août, elle participera à ses premiers Mondiaux sur la distance. Rencontre avec une jeune femme qui progresse au plaisir.
Pour votre première participation aux championnats de France sur 100 km, vous raflez le titre en 7h42’24’’ et vous empochez votre première sélection internationale. C’est ce que l’on appelle une entrée fracassante dans la longue distance. Vous attendiez vous à une telle performance ?
Pas du tout, car c’était mon premier 100 km. C’est une distance qui m’attirait beaucoup. En même temps, j’ai tout fait pour arriver le mieux préparée possible. Mon coach (Jérémie Cabadet) s’est renseigné sur les plans d’entraînement sur cette distance et il a contacté Laurence Klein, la recordwoman de France de la distance, qui lui a donné pas mal de conseils. Je suis également partie au Kenya m’entrainer pendant trois semaines en mars, juste avant la course. J’étais contente de ma préparation avant de prendre le départ. J’avais réussi à faire exactement ce que je voulais et je n’avais pas eu de pépins physiques, mais c’était quand même l’inconnu et jusqu’au 95e km, je n’étais assurée de rien.
Vous étiez plutôt habituée des marathons, .pourquoi avoir décidé de monter sur 100 km ?
Après le marathon de Valence, où j’ai battu mon record en décembre (2h41’28’’), je ne savais pas trop quoi faire en début d’année. Mon coach voulait que je refasse un marathon au printemps et on avait commencé à se projeter sur celui de Rotterdam, mais j’avais enchainé pas mal sur cette distance et j’avais envie d’un peu de changement. C’est finalement mon copain, Nicolas Navarro, qui m’a soufflé cette idée avant que je parte en stage au Kenya. « Tu sais, il y a aussi le 100 km qui existe. En plus, cette année, il y a les championnats du monde en août, cela ne te dirait pas ? » Je connaissais cette distance, bien sûr, mais je ne m’y étais jamais projetée. Quand il me l’a proposé, je me suis dit ‘’pourquoi pas’’. J’aime bien courir longtemps et le 100 km pouvait me correspondre.
L’athlétisme, ce n’était pourtant pas votre sport de prédilection. Petite, vous préfériez taper dans le ballon, non ?
C’est vrai. Même si j’ai quand même pratiqué l’athlétisme, en CP, puis en CM2. Mais j’ai très vite choisi le football parce que mon père et mon frère en faisaient et que j’avais envie de faire comme eux. J’ai commencé au collège, en 4e, et j’en ai fait durant six ans. Je jouais numéro 6, un poste où l’on court beaucoup car il faut récupérer le ballon pour le redistribuer. C’est ce qui me plaisait le plus, j’adorais ça. Je n’avais pas forcément de technique mais j’avais le cardio pour courir partout. Cela a dû m’aider à progresser en endurance.
Comment êtes-vous finalement revenue à la course à pied ?
Après mes études à Toulouse, je suis arrivée à Aix-en-Provence pour travailler. Je n’avais pas trop le cœur à chercher une nouvelle équipe (elle évoluait alors en division d’honneur à l’US Castanet). Quand on joue au foot, on est souvent très soudées, car on est tout le temps ensemble et je n’avais pas envie de repartir à zéro dans une autre équipe avec d’autres filles. J’ai donc arrêté le football et je me suis mise à la zumba pendant un ou deux ans. Ce n’est qu’en 2014 que j’ai remis les baskets pour courir. Un ami m’avait mise au défi de participer à un marathon. Je n’avais encore jamais participé à une course officielle. J’ai commencé par le marathon de Toulouse et je me suis régalée ! Pourtant je m’étais entrainée toute seule, au feeling, juste en courant trois ou quatre fois par semaine. C’est d’ailleurs ce qui m’a motivée à rejoindre le club d’Aix-en-Provence un an plus tard, car j’avais envie de voir ce que cela pouvait donner en étant encadrée et mieux préparée.
Qu’est-ce qui vous plait aujourd’hui dans cette pratique ?
Le fait de se retrouver avec soi-même. Même si mon rythme a beaucoup changé depuis mes débuts, surtout maintenant avec la prépa des 100 km, où je m’entraîne deux fois par jour, le plaisir reste le même. J’aime cette sensation de liberté. C’est un peu comme une échappatoire. Dès que je cours, je me sens bien. J’apprécie aussi beaucoup le fait de courir en club et de pouvoir partager des entrainements en équipe avec d’autres athlètes. En plus mon copain court aussi beaucoup, et on court parfois ensemble, c’est motivant.
Justement, vous partagez la vie de Nicolas Navarro qui a terminé 12e des derniers JO sur marathon. Est-ce que cela ne vous met pas davantage de pression ?
Au contraire, cela me booste beaucoup. C’est une véritable motivation. Quand je vois tout le chemin qu’il a parcouru, cela me donne envie, pas forcément de faire pareil bien sûr, car je sais que je n’en ai pas les capacités, mais de donner à chaque fois le meilleur de moi-même. Il a beaucoup d’expérience et il est aussi de très bon conseil. Cela m’aide beaucoup sur les entrainements mais aussi sur tous les à-côtés et finalement, c’est plus un avantage de l’avoir au quotidien à mes côtés.
Que vous apporte-t-il dans votre pratique ?
Il m’a aidée à ne pas en faire trop. Au début, j’avais en effet tendance à vouloir toujours en faire plus. Par exemple, certains jours, j’avais envie d’aller courir avec lui sur son entraînement du soir alors que je m’étais déjà entraînée le matin, mais il me disait toujours « non, sur ton plan c’est écrit récup’, donc tu ne cours pas ». Il m’a aussi fait comprendre qu’il ne fallait pas vouloir en faire trop ou aller trop vite sinon c’était la blessure assurée. Même chose sur les footings de récupération. Il m’a toujours expliqué que cela ne servait à rien de courir trop vite, qu’il valait mieux les faire doucement pour régénérer son corps et être ainsi plus disponible sur les autres séances plus importantes. Il m’apporte aussi beaucoup sur la nutrition ou sur les aspects psychologiques. Je n’ai pas de préparateur mental par exemple et je n’en ressens pas le besoin, mais je pense que l’avoir à mes côtés m’aide aussi dans ce domaine.
Vous vous entrainez souvent ensemble ?
Oui, surtout sur les footings de récupération. Sur les séances spécifiques, on n’a pas le même rythme mais parfois je le suis en vélo ou c’est lui qui en fait de même.
Vous avez amélioré vos chronos cette année sur de nombreuses distances, comment l’expliquez-vous ?
Par l’entraînement. C’est la clé. J’ai effectué beaucoup plus de kilomètres depuis un an. J’ai aussi commencé à faire du biquotidien notamment sur la préparation du marathon de Valence, où je doublais un ou deux jours par semaine. Et j’en ai fait encore plus souvent avec la préparation des 100 km. Je pense que j’ai aussi été plus attentive à la récupération.
Vous êtes contrôleuse aérienne à l’aérodrome d’Aix-les-Milles, comment conciliez-vous votre métier et vos entraînements ?
J’arrive à m’organiser avec mon emploi du temps. Je travaille pas mal en horaires décalés, les week-ends et les jours fériés aussi, cela permet de m’arranger plus facilement. J’ai aussi la chance d’avoir des collègues très conciliants. L’hiver par exemple, ils me laissent m’entrainer le midi sur ma pause méridienne afin que je puisse profiter du soleil. Et en été, étant donné qu’il fait très chaud, j’essaie de privilégier davantage les entraînements le matin et le soir et là encore ils m’aident à m’organiser au mieux. Ce serait sans doute plus simple sans travailler, mais je n’ai vraiment pas à me plaindre.
L’été dernier vous vous êtes également essayée au trail avec une victoire sur les Passerelles du Monteynard sur 25 km…
J’ai beaucoup aimé cette course et cela m’aurait plu de la refaire cette année, mais c’était impossible de la caser dans la préparation des championnats du monde. Je pense que j’y reviendrai. Pour l’instant, la route est ce qui me plait le plus, mais l’été, j’aime bien changer un peu. Mais pour éventuellement envisager de me lancer dans le trail à l’avenir, il faudra aussi que je travaille la technique dans les descentes car pour le moment je ne suis pas très à l’aise.
Comment imaginez-vous la suite de votre carrière ?
Je ne sais pas si on peut vraiment parler de carrière. J’ai juste envie de continuer à prendre du plaisir. Là, le 100 km, cela me plait beaucoup et je suis contente d’en refaire un. J’espère d’ailleurs améliorer mon chrono sur les championnats du monde. Mais pour la suite, je ne sais pas encore. Beaucoup de personnes me disent que je pourrais aussi monter sur les 24 heures après… mais, là tout de suite, j’ai plus envie de redescendre sur marathon pour voir si l’entrainement avec beaucoup de kilométrage m’a fait passer un cap sur 42,195 km. On verra, il faut d’abord que cela reste du plaisir !
Propos recueillis par Véronique Bury