J’aime Courir lance une série consacrée à des séances d’entraînement inoubliables, racontées par leur acteur principal. Premier volet avec l’ancien steepleur, Yoann Kowal, qui disputera ce dimanche 2 octobre son premier marathon à Londres, un mois et demi après avoir pris la quinzième place du 10 000 m lors des championnats d’Europe de Munich.
Le programme
2 x 10 km réalisés en 31’26 et 30’59 avec 1km de récupération active (15km/h). Soit un bloc total de plus d’une heure d’effort.
Où et quand
Le 11 septembre 2022 à 10h du matin, autour du lac Matemale, près de Font-Romeu, à 1500 m d’altitude, beau temps, 18 degrés.
Le contexte
Cette séance a été réalisée trois semaines avant le marathon de Londres, en remplacement du traditionnel semi-marathon que les marathoniens ont l’habitude de placer à trois semaines de leur objectif. Il s’agissait donc de la dernière grosse séance avant l’événement, dans le cadre d’un cycle de préparation terminale. Lors de cet entraînement, Yoann Kowal a été tiré à chaque fois pendant les huit premiers kilomètres par un sparring-partner kényan. Un ami, Jean-François, l’accompagnait également à vélo afin de simuler les différentes phases de ravitaillement en eau et gels. Enfin, Yoann avait décidé de se lever à 5h50 afin de se mettre dans les mêmes conditions horaires que celles qu’il rencontrera à Londres. Il a réalisé des étirements une heure après son petit déjeuner spécial marathon, a commencé son échauffement à 9h et entamé sa séance à 10h, heure du départ du marathon de Londres (décalage horaire compris).
Les sensations de Yoann Kowal
« J’appréhendais un peu »
« Cette séance a été particulièrement marquante parce que c’était la première fois que je courais aussi longtemps à cette allure à l’entraînement. Jusqu’à présent, étant un coureur de 1500 m et de 3000 m steeple, je n’avais jamais fait plus de 10 km à ce tempo à l’entraînement. Là, je doublais la mise et j’appréhendais un peu. D’autant que cette séance venait achever une grosse semaine d’entraînement au cours de laquelle j’avais fait 136 km en quatre jours. Je sentais que mes jambes étaient tendues et courbaturées.
Au début, je suis parti en faisant confiance à mon sparring-partner, auquel j’avais donné les allures tout en lui demandant de lisser les temps, mais il a plutôt fait le yoyo avec le rythme. On a commencé un peu trop lentement, puis il a relancé avant de ralentir à nouveau. C’était un peu vallonné, il y avait des flaques d’eau, on a dû faire quelques détours. Cela m’a un peu travaillé au début, parce qu’il ne faisait pas ce que je lui avais demandé. Et puis j’ai arrêté de me prendre la tête. Et finalement la séance c’est bien passé.
« Un bon indicateur de mon état de forme »
Je me suis retrouvé en situation de compétition, sans pour autant passer en mode compétition. Ça n’a pas été roulant, ni facile. Lors de la 2e répétition, entre le 7e et le 8e kilomètre, ça a même été très dur. Mais, au final, j’ai réussi à bien finir à chaque fois sur les deux derniers kilomètres et j’ai réalisé les temps que je voulais. C’était important pour moi. Car au début de la préparation, j’avais commis des erreurs en partant trop fort sur certaines séances et je m’étais brûlé les ailes. Là, je réalise les temps voulus avec une gestion de l’effort pas vraiment idéale. C’est un bon indicateur de mon état de forme et une bonne séance de réglage à l’approche du marathon. Car cela m’a aussi permis de voir ce qui n’allait pas au niveau des ravitaillements. Par exemple, si je bois trop, je me rends compte que je suis un peu ballonné. J’en tiendrai compte à Londres. »
A vous de jouer
« Une séance qui demande un fort investissement mental »
Patrice Binelli, responsable national du running, décrypte la séance de Yoann Kowal et donne des clés à ceux souhaitant s’en inspirer.
« Cette séance s’adresse à des athlètes aguerris, qui préparent un marathon et ont entamé une préparation spécifique. Elle est intéressante parce qu’elle permet de réaliser un travail de durée à allure marathon et peut donc venir remplacer la traditionnelle compétition que l’on effectue trois ou quatre semaines en amont d’un marathon. Mais attention, c’est une séance qui demande un investissement mental bien plus important que de participer à une simple compétition.
On la déconseillera donc à ceux qui préparent leur premier marathon et qui s’entrainent peu, car elle risque d’être un peu longue et peut générer une fatigue préjudiciable.
On la conseille davantage à des athlètes capables de courir le marathon en au moins trois heures. Après cette séance, il faudra dans tous les cas prendre le temps de bien récupérer pour retrouver de la fraicheur, afin d’aller jusqu’à l’objectif final dans de bonnes conditions. Cette séance est un test qui marque généralement le moment où l’on commence à alléger et à réduire la quantité de travail, en prévision de l’objectif. »