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La séance clé de Baptiste Chassagne

J’aime Courir vous embarque dans la foulée des plus grands coureurs, dans une série consacrée à des séances d’entraînement marquantes, racontées par leurs acteurs principaux. Aujourd’hui, Baptiste Chassagne nous raconte sa « reco du soleil », sur les sentiers de l’Ultra Trail du Mont-Blanc, un peu plus de trois semaines avant la course, dont il a finalement pris une superbe deuxième place.

LE PROGRAMME

La séance consiste en une reconnaissance du parcours de l’UTMB, étalée sur trois jours. Pour cela, Baptiste a divisé le tracé en trois parties. Le premier jour, il est parti du point de ravitaillement des Contamines pour rallier Courmayeur, cinquante kilomètres plus loin, en Italie. Le lendemain, il a enchainé avec une nouvelle portion de 50 km entre Courmayeur et Champex, en Suisse. Enfin, il a achevé le bloc par une dernière section de 45 kilomètres entre Champex et Chamonix. Côté rythme, l’idée était d’avoir la même allure de course sur les trois jours, alors qu’en compétition, l’allure de course se dégrade logiquement au fil des kilomètres. De ce fait, Baptiste était légèrement est en dessous de son allure de course le premier jour, mais il était au-dessus le dernier jour. C’est une allure dite « endurance fondamentale », c’est-à-dire de zone 2 sur une échelle de 5. N’ayant pas de montre, l’athlète courait uniquement ‘’à la sensation’’. Sur ces trois journées, il a couru entre cinq et six heures par jour, en matinée. L’après-midi était consacré à l’alimentation et à la récupération, grâce à des siestes à l’hôtel. Il a également pu profiter de l’eau fraiche d’un lac pour y tremper ses jambes le deuxième jour, et ainsi faciliter sa récupération.

OÙ ET QUAND

Les lundi 5, mardi 6 et mercredi 7 août sur les sentiers autour du Mont Blanc. Soit trois semaines avant la course de l’UTMB, programmée le vendredi 30 aout. Le matin, entre 7h et 14h. Le temps était ensoleillé et sans nuage, avec des températures agréables, comprises entre 28°C dans les vallées et 15°C en montagne.

LE CONTEXTE

Baptiste Chassagne avait fait de l’UTMB son objectif principal de l’année. Avant cette séance, il avait commencé à monter doucement en charge à l’entrainement « en faisant des séances avec assez peu d’intensité, mais beaucoup plus d’allure de course, c’est-à-dire autour de 140-155 pulsations cardiaques par minute, pendant des heures, toujours en montagne ». Il sortait notamment d’une semaine à 160 km pour 11 000 m de dénivelé positif, suivie d’une deuxième à 180 km pour 14 000 m de D +. Entre S-6 et S-2, il était également en plein stage en tente hypoxie, passant chaque jour près de 15 heures à 1600 m d’altitude simulés. Lors de cette séance de trois jours, il est parti avec une quinzaine de copains de la vallée, dont deux athlètes également inscrits à l’UTMB. Il a pu profiter de la fraicheur de certains potes venus l’accompagner uniquement sur le deuxième ou le troisième jour. Enfin, il est parti en emportant avec lui un peu plus de matériel que sur l’UTMB : « petit shampoing, t-shirt de rechange, nourriture de l’effort pour trois jours et couverture de survie », soit 2 kg de plus sur le dos. Après cette reconnaissance, il a pris deux jours de récupération avec un peu de vélo avant de participer le samedi à un trail de 36 km pour 2800 m de D + afin de remettre un peu de rythme, portant ainsi sa S-3 à 200 kms cumulés pour 14 000 m de D +. Il a ensuite diminué la charge d’entraînement en effectuant une « semaine très cool » et un affûtage en U de 80 km hebdomadaire, puis « quelques footings tranquilles » avant l’UTMB.

LES SENSATIONS DE BAPTISTE CHASSAGNE

« J’avais déjà couru l’UTMB et je connaissais le parcours. Ce n’était donc pas une reconnaissance en mode découverte, mais plus une reconnaissance en mode entraînement. J’estime qu’un bon traileur ressemble à son terrain de jeu. Contrairement à la piste, qui reste globalement la même partout dans le monde, il y a une vraie notion de spécificité en trail. La Diagonale des fous ne ressemble pas à l’UTMB, ni à une course américaine, il est donc important de s’imprégner du parcours pour pouvoir y développer des qualités spécifiques. Mon objectif était avant tout d’effectuer un grand nombre de kilomètres sur le parcours de l’UTMB, et ce sur un nombre de jours restreints, avec la fatigue qui s’accumule et en assurant des phases de récupération. Comme on l’avait déjà fait tous ensemble l’année dernière avec des potes, je n’avais aucune pression, au contraire ! C’est un moment très convivial que j’attendais avec beaucoup d’impatience et de sérénité. J’avais hâte de passer du temps en montagne en allant chercher ces sensations, hâte de vivre ces moments avec les copains. Car même si on a tous des niveaux différents et que chacun court globalement à son rythme, on se retrouve le soir et cela permet de poser des ancrages positifs tout au long du parcours.
Cette séance a été une vraie brique dans ma préparation car elle est venue confirmer mes bonnes sensations. L’année dernière, j’avais fini très fatigué. Alors que cette année, je sentais que j’en avais encore dans les jambes. Je me sentais bien plus robuste. Comme si j’avais passé un cap, que j’avais muté physiquement. J’étais aussi mieux acclimaté à l’altitude. Peut-être parce que j’étais alors en plein stage hypoxique. En tous cas, ces bonnes sensations m’ont accompagné pendant toute la reco et elles m’ont mis en confiance avant l’UTMB. Ça a été un vrai moment clé.
Cette séance m’a aussi permis de corriger certaines choses au niveau de la nutrition. Je me suis aperçu que j’avais des difficultés à redémarrer tous les jours, car j’étais en dette énergétique. J’ai donc corrigé ça le jour de la course en mangeant un peu plus. Elle m’a aussi beaucoup aidé le jour J, entre le 45e et le 80e km. J’ai vécu un long moment compliqué, notamment dans la zone des pyramides calcaires, le passage le plus technique et le plus sauvage de l’UTMB en altitude et en pleine nuit, vers 1h30 du matin. Je me suis alors souvenu de ce passage lors de notre reco que l’on avait faite de jour. Cela avait été un moment assez magique, car c’est un endroit très beau. Je me suis souvenu des sensations que j’avais éprouvées auprès de mes potes Paulo et Adrien et cela m’a reboosté. J’avais l’impression qu’ils étaient là avec moi à mes côtés et cela m’a permis de basculer dans un état d’esprit positif. C’est surtout pour ces ancrages positifs que cette séance est importante pour moi. Elle m’apporte énormément d’un point de vue mental. Même mon corps s’imprègne de la nature. C’est donc un excellent entraînement pour les jambes, pour le cardio, pour l’estomac, mais aussi et surtout pour la tête.
»

À VOUS DE JOUER

Simon Gosselin, entraineur de Baptiste Chassagne, décrypte la séance de son élève et donne les clés à ceux qui souhaitent s’en inspirer.
« Ce type de séance est spécifique à l’ultra trail et aux épreuves de plus de 100 km. Elle est intéressante d’un point de vue musculaire et énergétique car elle permet d’effectuer beaucoup de volume en trois jours, ce que l’on fait rarement à l’entraînement. Le fait d’aller reconnaitre le parcours permet aussi de s’en imprégner, notamment pour les parties que l’on aura à faire de nuit, et de tester son alimentation avant l’épreuve. En revanche, comme c’est une grosse séance, il est préférable de l’éloigner du jour J afin d’avoir le temps de bien récupérer et de ne pas non plus la programmer trop tôt dans la préparation, afin d’éviter un trop gros stress pour l’organisme. L’idéal est de la prévoir trois à quatre semaines avant la course. Pour les coureurs amateurs, on conseille toutefois de réduire le parcours, en retirant certaines parties, ou d’allonger la séance en passant à quatre jours successifs, afin de ne pas dépasser les 8 heures d’effort par jour à son allure de course, ni les quatre jours consécutifs sur les sentiers. Sinon, ce serait trop. Le fait de partir à plusieurs est également un plus. Le côté convivial permettra en effet de se construire des ancrages positifs qui seront de précieux atouts pour le jour J. Si on ne peut pas se rendre sur le lieu de la course, cette séance peut tout de même rester intéressante sur un autre parcours pour faire du volume sur trois ou quatre jours. »

Véronique Bury pour J'aime courir - Photos : Alanis Duc et Justin Galant

Rédaction J'aime Courir, le 04/10/2024 12:04:00
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